PHILOSOPHIE SOCIALE.

L’article qui suit est le troisième que nous envoie M. *** , nous le publions comme nous avons publié les deux premiers, non qu’il soit en parfaite conformité d’opinion avec la rédaction du Libertaire, mais parce qu’il agite une question philosophique qui est la question-mère du Bien ou du Mal, problème dont la solution dans un sens ou dans l’autre est pour l’Humanité une cause de salut ou de déchéance. Les idées de ce genre appellent et nécessitent la discussion ; il est obligatoire pour qui s’occupe de science sociale, de les scruter attentivement, afin de rejeter à terre et de refouler dans l’ombre et dans l’ornière, pour être trituré par la roue du progrès, ce qui parmi elles n’est qu’erreur ou caillou ; ou afin d’enchâsser et de [certir] dans le cerveau du genre humain, de faire étinceler à la lumière ce qui parmi elles peut être vérité pure ou diamant. Les idées à facettes auxquelles le dialogue suivant sert d’écrin sont celles de la nature du diamant ? j’ai bien peur pour elles qu’elles ne soient que du stras. — De deux choses l’une : ou M. *** cherche, sous des dehors trompeurs, à restaurer l’Autorité à la veille de s’écrouler de fond en comble dans le ciel et sur la terre, à reconstituer sous une dénomination nouvelle le vieux Dieu et le vieux Culte, à remettre à neuf l’antique et patriarcale exploitation de la femme et des enfants par l’homme, c’est-à-dire de l’homme par l’homme ; ou, idéologue sincère et de bonne volonté, mais empêtré dans les plis de l’éducation bourgeoise et dans les trous même qu’il fait pour en sortir, — il cherche à éclairer les autres et soi-même, à se débarrasser du fardeau des préjugés. C’est à ce dernier titre seulement qu’il est accueilli par le Libertaire. Aussi ferons-nous suivre son article de quelques objections, sans toutefois le réfuter en détail, ce qui nous entraînerait trop loin pour l’espace dont nous pouvons disposer, ni relever nombre de naïvetés à la Lapalisse, les êtres vivants et organisés, par exemple, comme s’il pouvait y avoir quelque chose au monde qui ne fût ni vivant ni organisé.


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Qu’est-ce que Dieu ? — Qu’est-ce que le Monde ? — Qu’est-ce que l’Homme ?


SECTION PREMIERE.

Qu’est-ce que Dieu ?

— Qu’est-ce que Dieu ? monsieur Karpos.
— De quel dieu me parlez-vous ? Est-ce du dieu-bœuf, du dieu-bouc, du dieu-chien, du dieu-serpent ou du dieu-barbu ?
— Notre très sainte mère l’Eglise ne reconnaît aucun des dieux que vous avez nommés. Je parle de celui qui créa le Ciel et la Terre, de Dieu en trois personnes : quel est-il ? monsieur Karpos.
— Je vous le demande à vous-même, mon ami Céphas.
— Mais Dieu..., c’est... c’est celui qui est, a dit Moïse : Ego sum qui sum, a dit lui-même le Bon-Dieu.
— Me voilà bien renseigné : ah ! que n’ai-je étudié comme vous en théologie ?... N’avez-vous plus rien à me dire, vous qui êtes si savant et qui vous êtes abaissé jusqu’à me demander ce que c’était que Dieu ?
— Si fait, monsieur Karpos : Dieu est un être infini auquel on ne peut rien ôter ni rien ajouter, et qui possède toutes choses en lui, comme l’a prouvé le Père Malebranche.
— J’ai entendu parler de ce Père Malebranche ; si je ne me trompe, c’était un jésuite qui faisait l’article dieu pour le compte de la maison Ignace Loyola.
— Comment, monsieur Karpos, serait-il possible que vous ne croyiez pas en Dieu ?
— Hélas ! mon ami Céphas, je vous avoue que je ne crois pas au dieu de Moïse qui n’était qu’un ours mal léché, un sauvage féroce, ignorant, grossier, et si mal-propre qu’il semble n’avoir jamais passé un peigne ni dans ses cheveux ni dans sa barbe. Je ne crois pas plus au dieu du Père Malebranche, qui possède en lui les Jésuites qu’il pourrait étouffer, et qu’il laisse vivre pour le malheur de notre espèce, et qui s’est fait le patron de tous les Fra-Diavolos à couronnes et à résilles.
— Mais à quoi croyez-vous donc ?
— Je crois à moi, Karpos, qui ne crois point à votre Dieu, et à vous, Céphas, qui y croyez. Je crois à la Terre, notre mère commune, que nous habitons vous et moi, et au Soleil qui nous éclaire. Je crois enfin au Monde-Universel qui se gouverne par lui-même, c’est-à-dire par sa propre intelligence ou la raison universelle qui vit en toutes choses, selon les besoins de la matière. — Maintenant, ne me demandez rien de plus sur ce sujet, parce que ni ma raison ni la vôtre, Céphas, ne peuvent concevoir autre chose qui soit rationnel.
— Vous êtes-vous jamais demandé quelle était l’essence de la raison-universelle de laquelle vous semblez faire votre Dieu ?
— Céphas, mon ami, je vous prie d’adresser cette question à saint Thomas d’Aquin, qui a écrit là-dessus beaucoup de choses incompréhensibles pour lui et pour ses lecteurs.


SECTION DEUXIEME.

Qu’est-ce que le monde ?

— Moi, Céphas, à qui on n’a jamais parlé au séminaire que de la Terre, du Soleil et de la Lune, vous me feriez bien plaisir, monsieur Karpos, si vous vouliez me dire ce que c’est que le Monde-Universel auquel vous croyez si exclusivement.
— J’appelle Monde Universel l’espace au milieu duquel est dispersé un nombre infini d’autres mondes : ce que nous voyons et ce que nous ne voyons pas par rapport à la distance.
— Qu’appelez-vous un monde ?
— J’appelle un monde une famille planétaire.
— De quoi se compose une famille planétaire ?
— D’un certain nombre de corps femelles que nous nommons planètes, et d’un corps mâle qui les gouverne et les féconde, que nous nommons soleil.
— Est-ce des soleils que les planètes tiennent leur formation ?
— Je ne le crois pas ; la substance des soleils n’étant d’après leur apparence qu’un matière ignée, je les crois seulement des foyers d’où part l’électricité dont toute chose est pénétrée.
— Comment alors expliquez-vous leur formation ?
— Je crois qu’elles se forment par une union sympathique de tous les atômes, de toutes les molécules dont l’espace est rempli et que les soleils condensent jusqu’à ce qu’elles aient acquis une capacité de pesanter qui leur permette de prendre un mouvement régulier, au moyen duquel elles se complètent en acquérant la puissance d’attraction magnétique.
— Est-ce tout ce qui compose un monde ?
— Non. Tous les êtres qui se meuvent et toutes les planètes qui végètent à la surface des planètes appartiennent et font partie des mondes.
— Mais, monsieur Karpos, remarquez bien que vous ne parlez pas seulement de la Terre : vous avez dit, à la surface des planètes. — Vous parlez des planètes en général comme si vous étiez certain que toutes fussent habitées.
— Je crois en être certain, mon ami Céphas.
— Sur quoi êtes-vous fondé pour avoir cette croyance ?
— Sur ce que la Terre est habitée. — Aussi bien que toute chose a son germe, je crois que toute planète a ses êtres et sa végétation. Je ne crois pas qu’il soit possible d’expliquer autrement leur existence dans l’espace. — Je crois que les soleils sont aux planètes ce que tout mâle est à sa femelle, le principe essentiel des soleils aussi bien que celui des mâles étant le principe de la fécondation.
— Vous parlez des planètes comme si vous les croyiez des êtres vivants.
— Je crois aussi qu’elles sont des êtres vivants, comme vous Céphas et comme moi Karpos.
— Croyez vous que les soleils soient habités ?
— Je ne le crois pas : le rôle des soleils étant, comme celui de l’homme, de féconder, et non pas d’enfanter.
— Depuis combien de temps ces choses existent-elles ? Ont-elles eu un commencement ?
— Oui, certainement, comme corps particuliers ; mais comme système, comme principe, je les crois de toute éternité.
— Doivent-elles avoir une fin ?
— Prises individuellement, oui ; mais comme système, non. — La Terre peut cesser d’être comme planète et entraîner avec elle la destruction des espèces auxquelles elle a donné naissance et qui lui sot propres, mais c’est tout. Je crois le genre humain aussi indestructible que le germe planétaire ; s’il disparaît d’un monde ou avec lui, c’est pour se manifester dans un monde de formation nouvelle et qui lui-même ne peut être composé que des atômes des mondes détruits.
— Sur quoi encore êtes-vous fondé, monsieur Karpos, pour avoir cette croyance ?
— Je ne crois pas, mon ami Céphas, qu’une chose qui n’a pas eu de commencement puisse avoir une fin. Avoir toujours été implique devoir toujours être. Rien ne meurt dans la Nature. — Par sa puissance génératrice, une chose que nous croyons avoir disparu à jamais donne naissance à une chose nouvelle : la forme n’est rien ; une espèce peut finir en tant que forme, mais une autre espèce lui succédera, comme ce que nous appelons les jours succèdent aux jours, sans que pour cela les jours se ressemblent quant à la température.
— Cependant, il est dit dans les livres que le Monde fut créé dans un temps ; on fixe même l’époque précise de la création.
— Ceux qui ont écrit ces livres n’avaient pas conscience de ce qu’ils faisaient. — Par la même raison qu’ils ont dit que le Dieu de leur imagination est immuable, ils ont nié le commencement du Monde. Ce Dieu n’aurait pu créer le Monde sans avoir changé, car avant l’existence des mondes il eût vécu seul dans l’espace, le remplissant de lui-même et réduit à ne contempler que sa propre force qui serait restée une éternité inactive ; il faudrait qu’il se fût lassé de cette contemplation de lui-même ; il faudrait enfin qu’il eût changé, pour que l’idée lui fût venue de former l’Univers.
— Dieu aurait bien pu dans un temps créer ce que nous voyons, sans que pour cela il fût resté inactif avant ce temps ; d’autres mondes auraient pu exister déjà dans les parties de l’espace qui nous sont invisibles, inconnues.
— Céphas, mon ami, vous avez la tête dure. — Qu’importe qu’il y ait eu des modes avant ceux qui existent ; la question reste toujours la même : vous reculez seulement le premier jour de travail, et ce premier jour n’en existe pas moins dans votre pensée. — Aussi, bien que l’Idée ou la Raison-Universelle est immuable et ne recule jamais dans la voie éternelle du Progrès, elle n'a non plus jamais pu être séparée de la Matière, ni naître avant elle. — Je crois que les deux, les trois ou les quatre principes combinés (car on ne peut au juste en dire le nombre) qui composent le Monde-Universel, sont indispensables les uns aux autres, et qu’ils sont les uns et les autres éternels et infinis. — Je crois qu’on ne peut rien ajouter au Monde-Universel ni rien y retrancher, car une chose qui n’a pas de limite ne peut varier quant à l’étendue. Seulement, cette chose peut progresser dans ses formes, changer de couleur et d’aspect, éprouver enfin ce que tout être qui possède la vie éprouve, se multiplier en nombre et en force, ce qui est l’œuvre du principe générateur, mais décroître en même temps qu’elle se renouvelle.
— D’après vos idées le Monde serait incréé ?
— Je le crois ainsi. — l’Idée n’étant autre chose que l’âme de la Matière n’a pu en être séparée dans un temps ; une telle séparation eût amené la destruction de l’harmonie préétablie. Nous avons la preuve de ce que j’avance dans ce que nous appelons la mort, qui n’est autre chose que le résultat de la séparation de l’idée ou de l’âme d’avec le corps ou la matière humaine. Socrate a été pendant que l’idée ou l’âme humaine posséda son corps ; mais cette âme ayant un jour abandonné son corps parce qu’il était altéré dans son mécanisme Socrate n’est plus. Il serait impossible au plus habile chercheur de retrouver le moindre atôme de ce qui fut Socrate : nous savons qu’un philosophe de ce nom a existé, mais c’est tout. — Or, si l’Idée se fût jamais séparée des mondes ou qu’elle eût été dans un temps sans être unie à eux, les modes eussent cessé d’être, ou plutôt ils n’eussent jamais été. — Les mondes furent donc de tout temps gouvernés par l’Idée qui est en eux et qui leur appartient, comme vos oreilles, vos yeux, votre nez et votre bouche, Céphas, appartiennent à votre tête, que l’idée gouverne tant bien que mal, selon l’état de votre cervelle, et même de vos oreilles, de vos yeux, de votre nez et de votre bouche sans compter les autres parties de votre corps.


SECTION TROISIEME.

Qu’est-ce que l’Homme ?

— Qu’est-ce que l’Homme, monsieur Karpos ?
— L’Homme est un être vivant et organisé, supérieur à tous les autres êtres vivants et organisés qui habitent la Terre.
— Pourquoi l’Homme est-il supérieur à tous les autres êtres ?
— Parce qu’il peut, par les moyens que lui procure son intelligence, les soumettre tous à sa volonté.
— Qu’appelez-vous un être vivant ?
— Je reconnais comme être vivant celui qui possède le mouvement en lui et qui peut le communiquer à toutes les parties de son corps, celui qui porte en soi la faculté de penser, celui qui peut agir sans autre secours que celui de sa volonté.
— Selon vous, monsieur Karpos, tous les êtres vivants pensent, puisqu’ils possèdent le mouvement comme l’Homme, et comme lui la faculté d’agir.
— Je tiens pour certain que tous les êtres vivants pensent ; et il faut bien qu’il en soit ainsi, puisqu’ils délibèrent, prévoient les accidents et les évitent autant qu’ils le peuvent, qu’ils se bâtissent des demeures et pourvoient aux besoins de leur estomac pour eux et pour leur progéniture.
— Pourquoi, en ce cas, si les êtres vivants que nous nommons les animaux ont une volonté, sont-ils constamment livrés à celle de l’Homme ?
— Parce que la somme de leur intelligence est de beaucoup inférieure à celle que possède l’Homme, avec lequel ils n’ont de commun que la vie, et les besoins desquels la vie elle-même dépend, selon que ces besoins peuvent être ou n’être pas satisfaits.
— Qu’est-ce que la vie, monsieur Karpos ?
— C’est la manifestation de la présence et de l’activité de l’idée au cerveau de l’être.
— De quoi dépend-elle absolument ?
— La vie dépend absolument des fonctions de l’estomac et des poumons ; elle est ou elle n’est pas, selon que ces deux organes peuvent ou ne peuvent pas fonctionner.
— De qui l’Homme tient-il le mouvement ?
— Je crois avoir déjà répondu à cette question, mon ami Céphas. — L’Homme tient le mouvement de sa propre volonté.
— C’est aussi ce que j’entends du mouvement extérieur. Mais le mouvement qui s’opère au-dedans de lui, d’où lui vient-il ?
— Le mouvement intérieur provient de la circulation du sang, qui lui-même procède des fonctions de l’estomac. Lorsque la circulation cesse, l’Homme meurt.
— Alors, le sang est donc la vie, c’est donc lui qui nous donne la pensée : c’est donc l’âme, en un mot ?
— Ce n’est pas ainsi que je l’entends. Le sang n’étant que de la chair liquide, une matière que l’on peut analyser, ne peut être le principe intellectuel qui dirige l’être. Le sang n’est au corps de l’homme que ce que l’huile est à la lampe : ce n’est pas l’huile qui éclaire, c’est la lumière qu’elle conserve par les propriétés qui appartiennent à tous les corps gras. Le sang, par son activité et par les propriétés qui lui sont essentielles, maintient au corps de l’homme le principe pensant : c’est-à-dire qu’il entretient et fortifie l’appareil où vit la pensée, où éclosent les idées.
— Ah ! ah ! tout cela est très bien, tout cela est parfait, mon cher monsieur Karpos : mais je voudrais savoir le nom de la poule qui vient couver ces œufs d’idées, qui éclosent dans l’appareil où vit la pensée. — Sacré... ah ! mon Dieu, vous m’avez presque fait jurer, monsieur Karpos !
— Céphas, mon ami, vous me faites plaisir ! oui vraiment, vous me faites plaisir, car jamais je ne vous vis si amusant, si bon compagnon. Je crois, ma foi, que nous finiront par nous entendre, et qu’avant peu vous brûlerez votre catéchisme et enverrez Dieu au diable !
— Pas tant de compliments : je demande le nom de la poule ?
— Je l’appelle Electricité.
— Hein ?
— Je crois profondément que la couveuse, ou la poule, comme il vous plaît de l’appeler, Céphas, n’est autre chose qu’une étincelle ou un rayon du foyer d’électricité qui féconde notre famille planétaire. Les pensées, les actions des hommes ne sont que des œuvres de fécondation.
— Sur quoi êtes-vous fondé pour avoir adopté cette croyance ?
— Sur les effets de l’électricité sur tous les germes. Les savants ont remarqué, et chacun peut s’en convaincre par une simple observation, qu’au moment où les fluides électriques se dégagent de l’atmosphère, tout croît, tout végète, tout s’anime sur le globe, les hommes, les animaux et les plantes : les germes, qui étaient stationnaires auparavant, éclosent ; les hommes, les animaux et les plantes ressentent plus vivement les besoins de la reproduction. C’est ce fluide, c’est cet élément phénoménal qui pén[ê]tre toutes choses et dont l’essence est ignorée, que je crois être ce que vous nommez Dieu, par rapport au Monde, Ame, par rapport à l’Homme, et que j’appelle, moi, le Moteur-Universel, ne faisant qu’un Tout absolu avec ce que nous nommons la Matière.
— Et vous croyez que les hommes, les animaux et les plantes possèdent ce fluide, ce moteur, tous également ?
— Je crois que tous les corps organisés ou non organisés en sont possédés autant que la matière qui les compose a besoin d’en être pénétrée.
— Pourquoi les animaux, qui possèdent le mouvement intérieur et le mouvement extérieur comme l’homme, n’ont-ils pas la faculté de progresser dans la vie ? Pourquoi les plantes ne possèdent-elles que le mouvement intérieur : pourquoi ne peuvent-elles se déplacer du lieu où leur germe a crû ? — Enfin, quelle est la cause de la différence qui existe entre les hommes, les animaux et les plantes au sujet du mouvement et du progrès ?
— Je crois que cette différence appartient à l’organisation de l’appareil où le fluide électrique fonctionne. — L’Homme, doué d’un mécanisme plus parfait ou plus compliqué que celui qui appartient aux animaux, leur doit être supérieur : il peut ce que ces derniers ne peuvent pas. C’est par la même raison que les animaux doivent être supérieurs aux plantes.
— Mais cette différence existe même entre les hommes.
— Elle appartient à la même cause.
— Pouvez-vous me dire, monsieur Karpos, en quel lieu du corps de l’Homme se trouve le siège du fluide électrique ?
— Je n’affirmerai rien de positif à cet égard, ne voulant point, sans profit pour la science, prêter à rire comme ceux qui ont prétendu l’avoir découvert ; mais tout me porte à croire, par certains effets que je ressens au cerveau quand je pense, que là doit être le siège de l’appareil où fonctionne le principe intellectuel qui dirige l’Homme dans la vie.
— Après la mort, que croyez-vous que devienne cette étincelle électrique qui pendant la vie rend l’Homme si puissant et si parfait ?
— Je crois qu’elle retourne au foyer central d’électricité qui meut notre famille planétaire, d’où elle était sortie, et par lequel elle est réabsorbée.
— Pourquoi ne reste-t-elle pas au corps de l’Homme ? Dépendrait-il du sang qui s’est glutiné dans les veines de l’en faire sortir ?
— Non ; mais, par le fait de la cessation de la circulation du sang, le mécanisme qui appartient au corps de l’Homme s’arrête ; les deux mouvements, intérieur et extérieur, cessent. C’est alors que le fluide électrique se dégage du laboratoire où était sa fonction, ne pouvant, comme moteur de la matière et fécondateur de l’idée, rester inactif.
— Que croyez-vous que doive être l’Homme dans ses rapports avec lui-même, avec les familles animales et végétales qui vivent sur la Terre, et avec la Terre elle-même ?
— Il en doit être le souverain sans contrôle, aucune intelligence terrestre n’égalant la sienne, ni aucune intelligence étrangère n’étant jamais venue le dominer.
— Amen.
                                                                                                               M.***

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